IMAGO de Philippe Sarr

IMAGO ? Ça veut dire quoi ?

David Laurençon, éditeur de son état, m’envoie un livre il y a deux mois. Je ne le connais quasiment pas (je parle de David, pas du bouquin, que je ne connais pas non plus d’ailleurs) mais j’en ai déjà une image d’éditeur exigeant et barré. On est en juillet, j’ai été confinée un mois et demi de plus que tout le monde. Autant vous dire que j’ai envie de tout, sauf de lire. Ça attendra.

Ça a attendu fin août. Je regarde la couverture, le titre, l’auteur. Imago de Philippe Sarr. Imago ? Ça me fait penser à Vertigo de Hitchcock. Ça existe comme mot, ça ? Ça veut dire quoi ? Obligée d’ouvrir le dico pour le titre, ça commence bien ! Allez, zou ! Google ! En biologie, imago c’est le stade final d’un individu dont l’évolution se déroule en plusieurs phases. C’est donc censé être la dernière étape, le point culminant, la version la plus aboutie d’un être vivant. D’un point de vue psychanalytique l’imago c’est une sorte d’état absolu, d’idéal. J’apprends même qu’il y a des thérapies de couple Imago qui, je cite, libèrent la joie chez les couples. Youhouuuu ! Qu’on m’apporte popcorns, coca et lunettes 3D, j’arriiiiiive !

C’est pas des popcorns que j’aurais dû prendre…

On dit souvent qu’un écrivain doit nous emmener quelque part. Là, c’est sûr que Philippe vous emmène quelque part et pas en Monospace version père de famille, plutôt en Hyperloop façon Elon Musk sous coke (pléonasme). Parfois, on a juste envie de lui dire : « Attends deux secondes. Est-ce que tu peux aller un tout petit peu moins vite s’il te plaît. Hein ? On va faire une pause, respirer, profiter du paysage. On n’est pas bien là ? Et puis on repartira gentiment ». Ben non, Philippe, c’est pas du genre à faire des pauses et à repartir gentiment. Il fonce. Tu t’adaptes à son rythme ou t’es éjecté du manège.

😤😤😤 Ok tu veux la jouer comme ça ? Et ben on va le décoder ton Imago !

Deux récits parallèles se font écho.

La réalité met en scène Jad, agent immobilier et écrivain. Jad fume (aucune importance mais j’aime bien les gens qui fument). Jad est malade, envahi par un virus qui lui bouffe le cerveau. Or, Jad a des choses à finir.

L’imaginaire. On plonge dans un monde d’autant plus perturbant qu’il nous semble très proche. Dans cette fausse réalité, l’auteur convoque tout son univers personnel : ses références littéraires, ses démons, ses peurs et ses fantasmes.

Plus on avance plus les récits s’entremêlent. Réalité ? Imaginaire ? Et si c’était ça notre imago ? Une fusion des deux ?

Philippe est fort et courageux.

Fort, car son écriture est multiple. Il est capable de vous immerger dans un quotidien terre à terre de vendeur d’appartements : les visites, les collègues, les déjeuners. Il réussit à rendre de façon presque palpable, une atmosphère, des lieux, des personnes. Puis, son écriture se libère des contingences matérielles, s’amplifie et vous entraîne dans son univers… ou vous force, c’est selon.

Courageux, car il en faut, du courage, pour écrire ainsi. Il expose tout, boutique et arrière boutique. Tout doit disparaître !

Sauf qu’il m’a perdue. Je tenais bon, pourtant. Certes, je soufflais comme un veau mais je maintenais mon allure. À la fin, j’ai lâché les élastiques. Il y avait trop de monde(s) dans sa tête pour la pragmatique que je suis.

Si vous aimez les histoires bien structurées, un début, un milieu et une fin : n’y allez pas.

Si vous êtes prêt à partir à la recherche de votre imago : foncez.

C’est simple, c’est chez Sans crispation éditions et il vous suffit de cliquer ici !

V POUR VENDETTA de Alan Moore et David Lloyd

Il y a BD… et BD

Quand on me parle de BD, je pense à Tintin, Astérix, je pense aux livres de Pénélope Bagieu, Fab Caro... Bref, des bandes dessinées ou romans graphiques légers, drôles, divertissants, instructifs. Ça se lit vite, c’est une pause lecture agréable entre deux pavés… Evidemment, je pense à une exception, Maus, d’Art Spiegelman, mais, hormis ce livre, la BD a toujours été synonyme, pour moi, de ludisme.

Je savais très bien qu’en lisant V pour Vendetta, je n’allais pas rire à m’en faire une descente d’organes, mais, whaouuuuu, que ce soit le traitement graphique ou l’histoire, accrochez-vous !

Pourquoi lire « V pour Vendetta » ? Surtout maintenant ?

D’abord, parce que je voue une admiration sans borne à Alan Moore depuis que j’ai vu un documentaire sur lui, sur Arte. Ce type est génialissime, totalement hors-norme ! Pour en savoir plus, vous pouvez retrouver ici, l’article que j’avais écrit sur lui, à l’époque.

Ensuite, parce que V pour Vendetta est un classique, totalement culte. C’est, non seulement, une référence culturelle, mais également sociologique. Pour l’anecdote, cette BD est à l’origine du masque des Anonymous. Il FAUT l’avoir lu, histoire de mourir moins bête.

Zou ! C’est donc parti !

C’est pas une BD, c’est un manifeste 😱

Le pitch est simple : l’Afrique, les USA et l’Europe ont disparu suite à une guerre nucléaire. L’Angleterre est devenu un pays totalitaire aux mains d’un pouvoir fasciste qui contrôle tout (remarquez, c’est le principe👌). Un mystérieux homme masqué va, en quelques coups d’éclat, réussir à ébranler le pouvoir.

Certes, le sujet est déjà vu, on pense à toutes les dystopies dont la plus célèbre, 1984 de George Orwell. Mais, ici, le scénario fait toute la différence et réussit à nous raconter une histoire unique, celle d’un parcours initiatique, celui de Evey, la jeune fille que le héros sauve dès le début de l’histoire. Et ce parcours vous touche, vous questionne, vous oblige à vous situer. Le récit est tellement dense et exigeant !

C’est bourré de références historiques et culturelles (et encore, j’ai du en zapper plein 😱). Il y a de nombreux personnages qui représentent tous un tempérament humain, qu’il soit glorieux ou misérable. Plus la fin approche, plus la cadence et la narration deviennent bouillonnantes.

L’atmosphère y est sombre, sinistre, lugubre. Le traitement graphique est hyper réaliste, rythmé par des effets d’une richesse incroyable. Moi qui ai l’habitude de me focaliser sur le texte et de passer rapidement sur les dessins, j’en ai pris plein les yeux.

C’est comme si Alan livrait une sorte de manifeste du citoyen. Comme s’il mettait toutes ses valeurs, ses convictions, ses engagements dans ce livre qui s’apparente à un livre « testament » (même s’il n’avait pas l’âge de faire un testament quand il l’a écrit).

Les anglais sont vraiment très forts pour dénoncer les dérives de l’autoritarisme et ils ont un don pour imaginer et raconter des dystopies. ❤️ avec les mains pour Orwell, Huxley et Alan 🤩.

Pour conclure, cette BD est géniale ! J’envie celles et ceux qui ne l’ont jamais lue et qui vont la découvrir !

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