MOISSONS SANGLANTES : 1933, la famine en Ukraine / La Case du siècle sur France 5

Gareth Jones, ce héros inconnu

Alors non, ce n’est ni un talonneur au rugby (je fais genre mais j’ai regardé sur Wikipédia), ni le leader d’un groupe de rock.

Il est né en 1905 au pays de Galles. Il sort diplômé de l’université de Cambridge avec mention en 1929. Il parle couramment français, allemand et russe. Il enchaîne en devenant, en 1930, le conseiller en politique étrangère de l’ancien premier ministre britannique Lloyd George. Bref, à 25 ans, Gareth a déjà ce qu’on appelle un parcours de compète.

En 1933, il devient journaliste. Intrigué par des rumeurs de famine en Ukraine, il souhaite s’y rendre. Sauf que Staline interdit l’accès au pays (cruel, mais pas con). Il en faut plus pour décourager Gareth.

Commence alors un voyage de plus de 10 000 kilomètres à travers l’Europe, je le cite : « déchirée par les passions nationalistes, les haines de classes et la crise économique mondiale » (ça vous rappelle rien ? 🥶).

Il se rend d’abord à Berlin. Il y décroche son premier scoop : une interview du tout jeune chancelier allemand. Il est, en effet, le premier journaliste étranger à être autorisé à voyager avec Hitler dans son avion privé.

De Berlin, il se rend à Moscou. Il feinte, fait croire qu’il travaille toujours pour Lloyd George et souhaite rendre compte des miracles du communisme. Ça marche ! Il obtient un visa. La situation à Moscou est catastrophique : Gareth y croise des queues interminables aux rares distributions alimentaires, rencontre des paysans qui affluent dans la capitale à la recherche de nourriture. Et toujours « Ici, c’est dramatique, mais en Ukraine c’est pire ».

Il va réussir à s’infiltrer, traverser des villages avec toujours le même spectacle, des cadavres qui jonchent les routes, des enfants au ventre gonflé, des survivants qui attendent la mort et partout l’absence totale de nourriture.

Pourquoi cette famine dans un pays aussi riche en céréales ?

Staline souhaite transformer l’URSS en nation moderne. Pour mener son industrialisation à marche forcée, il a besoin d’argent, de beaucoup d’argent. Et l’argent vient d’où ? Des exportations de céréales.

Il va donc méthodiquement planifier la collecte de céréales partout mais surtout en Ukraine, riche en blé. Les paysans qui résistent sont déportés, ceux qui essaient de cacher une partie de leur récolte sont torturés ou tués. À la famine s’ajoute la terreur. Staline veut broyer et spolier l’Ukraine. Que ce soit une hécatombe, que les survivants mangent de l’herbe, des racines, des charognes ou des cadavres, le petit père du peuple s’en fout… comme de son peuple.

Gareth Jones va alerter le monde

Il fait une conférence de presse à Berlin le 29 mars 1933. D’abord horrifié par ses révélations, l’Occident ne va pas y croire longtemps. En effet, Gareth va être l’objet d’une campagne de diffamation par nombre de journalistes, dont un des plus prestigieux, Walter Duranty, le correspondant du New-York Times à Moscou et détenteur du prestigieux prix Pulitzer. Pour Walter, « Tout est admirable en URSS ». « Oui, les gens ont faim, mais ils n’en meurent pas ». Ben c’est sûr mon gars, si tu passes ton temps à répéter ce que te disent les officiels et à faire la bamboche avec eux tous les soirs à l’hôtel Métropole à Moscou, tout va bien !

Même le ministre français Édouard Herriot, soucieux de voir par lui-même l’état du pays, va se faire balader par les soviétiques dans un village ukrainien débarrassé de ses cadavres et remplis de figurants dodus, habillés de neuf. La visite se passe à merveille, à tel point qu’il dira, de retour en France : « L’Ukraine dont on me parle, c’est la Beauce ». Bon sang, mais que foutaient les renseignements ?!

Suite et fin de Gareth Jones

Ecœuré par ces attaques et devenu indésirable en Russie, Gareth part en Mongolie intérieure pour y couvrir les tensions entre Russes et Japonais. Il y sera assassiné la veille de son trentième anniversaire. Sur demande de Staline ? On ne le sait pas.

C’est le premier (et l’un des rares) journalistes occidentaux à avoir documenté et alerté sur l’Holodomor.

En deux ans, 7 millions de soviétiques dont 4 millions d’ukrainiens mourront de faim, 1,5 millions de Kazhaks et 1,5 millions de Russes. Cette famine est reconnue officiellement comme un génocide par l’Union européenne en 2022.

Le 28 mars prochain, la France se prononcera à son tour. Cette décision semble faire consensus à l’Assemblée nationale…. sauf pour le RN et LFI.

Documentaire disponible ICI jusqu’au 27 juin 2023

J’ai découvert un blog qui file la pêche !

Qui est Justin ?

Pour une fois, je ne vais pas vous parler de moi ni de mon blog mais vous inviter à aller voir la concurrence.

Justin est américain, il vit en Californie et est linguiste et informaticien.

Ça, c’est pour le CV.

Justin aime la France (à ce niveau-là, ce n’est plus de l’amour mais de la rage 😂). Il a profité du confinement pour apprendre notre langue et WOW ! Il parle (en tout cas il écrit) couramment.

On peut donc en déduire que Justin est doué mais ce n’est pas là sa seule qualité.

Justin vous fait découvrir et aimer la France.

En plus d’être doué, il a au moins deux autres qualités et non des moindres : il est incroyablement curieux et joyeux.

Il s’intéresse à tout ce qui est estampillé « français » ; nos régions, notre gastronomie, notre patrimoine, nos musées, nos films (bon sang, il connaît Ludovic et Josepha, si ça c’est pas un signe de curiosité). Il peut nous en remontrer un rayon sur le pays !

Il en a même fait un blog « Un coup de foudre« , car c’est bien un coup de foudre qu’il a eu pour la France. Et il est prolixe, Justin, newsletter, articles, podcasts (dont je me peux malheureusement pas profiter car je suis sourde, mais je suis sûre qu’ils sont passionnants), tout est bon pour nous communiquer ses trouvailles et ses conseils.

Son blog est une pépite de choses à ne pas manquer, de bonnes adresses, de bons plans, d’anecdotes… et d’humour, car il est drôle !

Voir la France à travers les yeux d’un étranger, c’est la redécouvrir, c’est s’émerveiller de choses auxquelles on ne prête quasiment plus attention, c’est se dire « mais oui, bordel, on a de la chance » !

Justin est un antidote à la morosité.

Ça a l’air de rien comme ça, mais la joie et l’enthousiasme deviennent des denrées de plus en plus rares.

L’époque est inquiétante, les catastrophes arrivent en escadrilles, on a tous nos soucis quotidiens. Alors quand quelqu’un comme Justin arrive avec sa bienveillance, sa légèreté, sa gaieté et ses découvertes, c’est un vrai shot de vitamines qui vous requinque pour la journée.

Allez sur son blog ! https://justinbusch.fr

Je vous jure, il devrait être remboursé par la sécurité sociale !

Bonne fin de semaine à tous !

LA PISCINE À ROUBAIX – Musée d’art et d’industrie André Diligent

Nos enfants nous servent à quelque chose. Enfin !

Fifille number 3 fait ses études à Lille. Après avoir vendu un rein pour l’installer en septembre (comment ça tu veux un presse agrumes ? Les oranges à croquer c’est délicieux. Un matelas ? Pourquoi faire ? Et j’en passe), nous sommes allés lui pourrir la vie pendant 3 jours avant Noël.

Bilan du séjour :

  • Lille est une ville magnifique
  • J’aime pas le welsh
  • J’aime pas la carbonade
  • J’aime la bière
  • J’adore leurs gaufres

Mais surtout, le saviez-vous ? Roubaix est à 15 minutes de Lille. À première vue, je m’en fous royalement, j’ai pas une passion dévorante pour cette ville. Ma seule référence, c’est le fameux « La Redoute à Roubaix » de mon enfance. J’ai été biberonnée aux catalogues de vente par correspondance et La Redoute était mon préféré et La Redoute était à Roubaix. Tout ce que je demandais, c’est qu’ils aient mon jouet favori dans leurs entrepôts.

Ça, c’était avant « Meurtre à Roubaix » sur France 3. Oui, je regarde les téléfilms policiers de France 3, ménagère de plus de 50 ans oblige. Bref, un corps est découvert dans un musée à Roubaix.

Wow ! Le musée ! Rarement vu aussi beau ! Un bijou d’art déco. Une ancienne piscine des années 30, transformée. C’est sublime et ça devient ma deuxième référence de la ville.

Go pour LA PISCINE !

L’histoire de LA PISCINE, du sport à l’art.

La piscine de Roubaix (la vraie piscine hein ?! celle où on nage dedans) est inaugurée en 1932. Sa construction a duré dix ans avec, pour cahier des charges, un seul mot d’ordre : qu’elle soit la plus belle piscine de France.

L’équipe municipale de l’époque, de sensibilité de gauche, souhaitait un lieu beau, efficace et accessible à tous, notables et ouvriers. En effet, berceau du textile, la ville compte une énorme population ouvrière qui vit dans des conditions déplorables (grande pauvreté, logements insalubres).

Le projet de la piscine de Roubaix répond donc à un objectif hygiéniste au service des classes populaires. Et le cahier des charges sera rempli. Elle est superbe et est considérée, à son inauguration, comme la piscine la plus moderne d’Europe.

Elle est dotée d’un bassin olympique, de bains publics, d’un réfectoire, d’un salon de coiffure, de manucure et de pédicure. Ce lieu va permettre une mixité sociale pendant 50 ans, jusqu’à sa fermeture en 1985, la voûte menaçant de s’effondrer.

Entretemps, la ville s’est pris de plein fouet la crise industrielle, économique et sociale. Hors de question d’entamer une rénovation coûteuse alors qu’on peut construire pour moins cher.

En parallèle, la question se pose de doter Roubaix d’un musée. Je vous passe toutes les péripéties politiques, culturelles et autres. Toujours est-il qu’en 1990, il est décidé de transformer la piscine abandonnée en un musée solidaire afin de respecter l’âme du site.

En 2001, TADAAAAAM, inauguration du musée LA PISCINE.

Une dinguerie

D’abord, le lieu. C’est superbe, vraiment. On est dans un cadre majestueux, une cathédrale dédiée à l’art. On arrive sous une nef fermée de part et d’autre par deux immenses vitraux. Et en son centre, un plan d’eau. Sur les côtés, des allées et au premier étage des coursives bordées de cabines.

Passé l’émerveillement pour le bâti, on s’intéresse aux œuvres.

Et là, vous allez continuer à en prendre plein les mirettes. Sculptures, peintures, arts décoratifs, textiles. Je suis un lapin pris dans les phares d’un 38 tonnes.

Y’en a partout ! Du classique, du moderne, du connu (Camille Claudel, Félix Vallotton, Léonard Foujita, Raoul Dufy, Jean-Baptiste Carpeaux, François Pompon, Vivienne Westwood), du moins connu (Paul Hémery, Jean-Robert Debock, Rémy Cogne, Maurice Asselin), des expositions permanentes, temporaires (William Morris).

Du beau PARTOUT !

J’ai juste 2 critiques à faire (râler, ma passion) :

  • C’est tellement abondant que j’ai eu du mal à m’y retrouver. Il m’a manqué un petit circuit explicatif (ou alors c’est moi qui ai zappé le petit livret conducteur à l’entrée).
  • L’éclairage est parfois mal adapté pour certains tableaux (lumière trop crue laissant certaines zones trop sombres).

Lille est à une heure de Paris en train. Roubaix est à quinze minutes de Lille (accessible en transport). Je ne peux que vous conseiller d’y aller, vous ne serez pas déçus, foi de bibliothécaire !

#LeNordestBeau

#ViveLesTéléfilmsdeFrance3

BOILLY, C’EST PARIS ! Chroniques parisiennes au musée Cognacq-Jay

Qui est déjà allé au musée Cognacq-Jay ? Qui ?

Ben pas moi !

Pour moi, Cognacq-Jay, c’était Léon Zitrone et son célèbre « À vous les studios, à vous Cognacq-Jay ». En aucun cas, ce n’était un couple de philanthropes, passionné d’art du XVIIIè siècle et fondateur des grands magasins de la Samaritaine.

Je cherchais une exposition à faire, sans vrai cahier des charges. Seule contrainte, ne pas être dans la foule. Exit donc, les Louis Vuitton et autres Louvre. C’est alors que je tombe sur la peinture choisie pour représenter l’exposition « Boilly, chroniques parisiennes ».

Il s’agit d’un autoportrait de l’artiste. Il a une bouille très sympathique, ça va parler de Paris, je ne connais pas ce musée. GO !

C’est qui, d’abord, Boilly ?

Originaire du nord de la France, il arrive à Paris en 1785. Il ne partira plus. Il traversera la révolution et différents régimes, tout en conservant son amour des gens et son mordant. Autodidacte, il va chroniquer visuellement la capitale avec humour et amour. On découvre un Paris inconnu, la prison des femmes (bâtiment aujourd’hui disparu), l’arrivée des diligences, les grands boulevards, les cafés. Tout est spectacle, il croque les bourgeois comme les indigents (cette peinture où les pauvres se pressent à une représentation de théâtre gratuite sous l’oeil amusé des bourgeois 😱). Ses tableaux sont vivants, expressifs, on a l’impression d’y être, on sent l’énergie nous traverser. Il aime Paris, ses excès, ses travers, ses beautés.

Plein les mirettes !

L’oeuvre de Boilly est foisonnante. Cela va de la peinture classique, aux portraits, en passant par les caricatures, les trompe-l’oeil et les illusions d’optique. C’est jubilatoire ! Ce type était d’une curiosité insatiable et un vrai touche-à-tout.

Loin des peintures classiques reproduisant scènes de batailles et grands du monde, il croque la vie quotidienne. Un vrai documentaliste. En cela, son oeuvre est riche en enseignement sur l’époque.

L’art du portrait est à son apogée. Il va créer un format unique, sorte de miniature qu’il peut finaliser en 2H, et ainsi réaliser le portrait de plus de 5000 parisiens, toutes classes confondues. Publicitaire avant l’heure, il « markete » ses propres oeuvres, valorisant sa signature avec différents effets. Sa série « Grimaces » met l’emphase sur les expressions humaines (rire, dégoût, avarice, colère et bien d’autres). C’est juste, c’est mordant, c’est jouissif !

Il s’intéresse aussi aux sciences, à la photographie naissante et propose des oeuvres étonnantes et pleines d’entourloupes.

N’ayons pas peur des mots, ça ne mord pas. C’est une des expositions les plus instructives et enthousiasmantes que j’ai faite dernièrement. Et pourtant, je ne suis pas XVIIIè siècle. Et pourtant, en sortant du musée, encore remplie de ses merveilles, je découvre qu’on m’a volé mon vélo. Ce qui en fait l’exposition la plus chère de mon existence… mais je ne regrette pas (même si j’ai maudit mon voleur ou ma voleuse et promis de lui éclater sa face contre le bitume 😈).

Si vous avez l’occasion, foncez tête baissée, je m’en porte garante 🤪. C’est jusqu’au 26 juin.

Psssst ! Allez-y en métro ou avec un bon antivol !

LA CARTE ET LE TERRITOIRE de Michel Houellebecq

Je viens de lire mon premier Houellebecq 🤔

Vous imaginez le stade de notoriété à atteindre pour faire partie des premières fois ? La référence qu’il faut être ? L’importance (sociale, culturelle, expérientielle et j’en passe) qu’il faut représenter pour que cette simple expression, « mon premier Houellebecq« , ait le pouvoir de transférer celui qui la prononce dans une catégorie définie de population ? Zou ! Je passe de ceux qui ne l’ont pas lu à ceux qui savent 🥳. Comme un sésame qui vous ouvre les portes d’un club fermé, un rite d’initiation qui vous fait passer d’un statut à un autre, un apprentissage quasi-obligatoire pour obtenir un rang particulier. Bref, je suis une princesse 😂 !!! Donc, il y a encore quelques semaines, je faisais partie de ceux qui n’avaient jamais lu Houellebecq !

Pourquoi avoir tant attendu ?

On en entend trop parler ! On se prend le chou sur le cas « Houellebecq« . On dit tout et son contraire sur lui, à coup d’infos, d’intox et de rumeurs : « il a quitté la France, il arrête d’écrire, il est dépressif, il se lance dans le Bio, il s’est suicidé, il est mort bouffé par ses chiens… » 😱. Bref, une sorte de grand foutoir dont, jusqu’à présent, je me tenais prudemment à distance.

Il paraît qu’il est cynique ! C’est même sa marque de fabrique. Or, je me méfie du cynisme. A moins de s’appeler Desproges. C’est très dur à manier, parfois drôle, souvent méchant et toujours stérile.

Enfin, son regard de cocker battu m’a toujours foutu le bourdon. Il parle tout bas, n’articule pas, donc je ne comprends rien. Quant à son détachement des choses matérielles, il ferait passer José Bové pour un trader shooté à l’ultra-libéralisme.

Pourquoi le lire maintenant, alors ?

Tout a commencé il y a deux ans (oui, je suis lente). Le Palais de Tokyo a donné carte blanche à Michel pour monter une exposition, « Rester vivant« . Pour une fois, pas d’intermédiaire, donc pas d’interprétation hasardeuse. C’est Michel qui nous parle directement, qui se montre tel qu’il en a envie. Zou, nous voici donc, Népoux et moi, déambulant au milieu de poèmes, de photos, d’installations, de musiques et d’expériences scientifiques. Surprise ! Non seulement, il est bien curieux pour un dépressif 😉, mais en plus tout témoigne d’une délicatesse et d’une fragilité émouvantes. L’idée m’effleure que le personnage mérite peut-être mieux que sa réputation. Mais j’en reste là.

Sauf que ces dernières semaines tout s’est emballé. La sortie de son dernier roman, Sérotonine, crée un énorme battage médiatique. La presse étrangère l’encense comme le meilleur écrivain contemporain. La France l’attend comme le dernier sauveur possible d’un marché littéraire en berne.

Bon sang, si ça se trouve ce type est génial et je passe à côté à cause de mes foutus préjugés !

C’est parti pour la Carte et le Territoire !

Moi qui adore les avis tranchés… ben j’en sais rien 😱.

Je suis allée de surprises en surprises.

D’abord, et en dépit de son regard vif et mutin (oui, c’est une vanne, nulle mais vanne quand même 🥳), il est drôle. J’ai souri et ri souvent. Son récit de la fête du nouvel an chez Jean-Pierre Pernaut me fait dire que c’est « The Place to Be » pour démarrer une nouvelle année.

Ensuite, il manie très très bien le cynisme et n’a pas grand chose à envier à M. Desproges. Preuve en est, un petit texte à la fin de cet article, sur les ravages du féminisme. La féministe que je suis a adoré 🤣.

Mais enfin, ne nous mentons pas, Michel n’a aucun style d’écriture ! Je m’attendais à une « patte » Houellebecq, à ce que ça pète ! Vociférations, provocations, inventions de langage… Je m’attendais à un avant et après, comme Céline. Rien. Mais RIEN !!! C’est bien écrit, c’est neutre, minimaliste, ordinaire.

Après tout, comme le disait Schopenhauer : « La première – et pratiquement la seule – condition d’un bon style, c’est d’avoir quelque chose à dire ». Et Michel a des choses à dire.

Sur ce sujet, je laisserai le mot de la fin à Népoux qui a tout résumé : « Michel, c’est un peu le normcore du style ». Voilà ! C’est ça 🥳🥳🥳 !

Houellebecq et les féministes
« Pour ma part j’ai toujours considéré les féministes comme d’aimables connes, inoffensives dans leur principe, malheureusement rendues dangereuses par leur désarmante absence de lucidité. Ainsi pouvait-on dans les années 1970 les voir lutter pour la contraception, l’avortement, la liberté sexuelle etc., tout à fait comme si le « système patriarcal » était une invention des méchants mâles, alors que l’objectif historique des hommes était à l’évidence de baiser le maximum de nanas sans avoir à se mettre une famille sur le dos. Les pauvres poussaient même la naïveté jusqu’à s’imaginer que l’amour lesbien, condiment érotique apprécié par la quasi-totalité des hétérosexuels en activité, était une dangereuse remise en cause du pouvoir masculin. Elles manifestaient enfin, et c’était le plus triste, un incompréhensible appétit à l’égard du monde professionnel et de la vie de l’entreprise ; les hommes, qui savaient depuis longtemps à quoi s’en tenir sur la « liberté » et l’« épanouissement » offerts par le travail, ricanaient doucement. Trente ans après les débuts du féminisme « grand public », les résultats sont consternants. Non seulement les femmes sont massivement entrées dans le monde de l’entreprise, mais elles y accomplissent l’essentiel des tâches (tout individu ayant effectivement travaillé sait à quoi s’en tenir sur la question : les employés masculins sont bêtes, paresseux, querelleurs, indisciplinés, incapables en général de se mettre au service d’une tâche collective quelconque). Le marché du désir ayant considérablement étendu son empire, elles doivent parallèlement, et parfois pendant plusieurs dizaines d’années, se consacrer à l’entretien de leur “capital séduction”, dépensant une énergie et des sommes folles pour un résultat dans l’ensemble peu probant (les effets du vieillissement restant grosso modo inéluctables). N’ayant nullement renoncé à la maternité, elles doivent en dernier lieu élever seules le ou les enfants qu’elles ont réussi à arracher aux hommes ayant traversé leur existence – lesdits hommes les ayant entre-temps quittées pour une plus jeune ; encore bien heureuses lorsqu’elles réussissent à obtenir le versement de la pension alimentaire. En résumé, l’immense travail de domestication accompli par les femmes au cours des millénaires précédents afin de réprimer les penchants primitifs de l’homme (violence, baise, ivrognerie, jeu) et d’en faire une créature à peu près susceptible d’une vie sociale s’est trouvé réduit à néant en l’espace d’une génération. »

A CELLE QUI EST TROP GAIE de Charles Baudelaire

Ce poème, issu des Fleurs du Mal, fut interdit car contraire à la morale religieuse et publique.

Ta tête, ton geste, ton airSont beaux comme un beau paysage ;

Le rire joue en ton visage

Comme un vent frais dans un ciel clair.Le passant chagrin que tu frôles

Est ébloui par la santé

Qui jaillit comme une clarté

De tes bras et de tes épaules.

Les retentissantes couleurs

Dont tu parsèmes tes toilettes

Jettent dans l’esprit des poètes

L’image d’un ballet de fleurs.

Ces robes folles sont l’emblème

De ton esprit bariolé ;

Folle dont je suis affolé,

Je te hais autant que je t’aime !

Quelquefois dans un beau jardin

Où je traînais mon atonie,

J’ai senti, comme une ironie,

Le soleil déchirer mon sein ;

Et le printemps et la verdure

Ont tant humilié mon coeur,

Que j’ai puni sur une fleur

L’insolence de la Nature.

Ainsi je voudrais, une nuit,

Quand l’heure des voluptés sonne,

Vers les trésors de ta personne,

Comme un lâche, ramper sans bruit,

Pour châtier ta chair joyeuse,

Pour meurtrir ton sein pardonné,

Et faire à ton flanc étonné

Une blessure large et creuse,

Et, vertigineuse douceur !

A travers ces lèvres nouvelles,

Plus éclatantes et plus belles,

T’infuser mon venin, ma soeur !

JUST KIDS de Patti Smith

Où je découvre Patti Smith !

La Nouvelle Star mène à tout ! J’ai découvert Patti Smith grâce à ce programme, il y a presque dix ans. Une candidate avait choisi Because The Night pour la phase des sélections. Seule avec sa guitare, elle chantait divinement bien, mais, surtout, je suis restée scotchée par la chanson !

Patti Smith : je connaissais vaguement le nom.

Zou ! Direction Google pour en savoir plus sur l’auteure de ce bijou. Patti, c’est d’abord un physique : une silhouette frêle et androgyne, une tignasse noire corbeau encadrant un visage racé de jeune Cherokee, à l’attitude rebelle et fière. Whaouuuuu !

Icône de la scène rock et punk des années 70, elle touche à tout, musique, poésie, peinture, photographie. Ses amants les plus célèbres sont Robert Mapplethorpe et Sam Shepard. Bref, on frôle la légende.

Où je découvre Robert Mapplethorpe !

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À l’époque, son nom m’évoque un artiste pointu qui a bossé avec Warhol. Mais j’en reste là, focalisée que je suis sur Patti, puis j’oublie…pendant dix ans.

C’était sans compter avec Népoux. Il y a quelques mois, on terminait une expo par notre sacro-sainte visite à la librairie du musée. Népoux me rejoint avec l’air d’un type qui vient de découvrir un gisement d’or et me tend un bouquin de photos. Je le cite « Des photos diiiingues, non mais regarde ! J’ai rarement vu aussi beau et aussi fort ».

Je feuillète le bouquin (qui est un recueil de photos de Robert) et c’est un choc esthétique ! Toutes les photos sont superbes, en noir et blanc, ultra stylisées. Le travail sur la lumière est phénoménal, le rendu est spectral, fantomatique, quels que soit les sujets.

Les sujets, parlons-en ! Portraits, fleurs, nudité masculine ou sexes, il réussit à tout rendre sublime et sensuel. Lumière, cadrage, grain, tout concourt à un esthétisme magistral qui me bouleverse. On touche à la beauté à l’état pur. Robert est un génie !

Subjuguée par Patti et Robert, j’étais fin prête pour lire Just Kids !

Rarement titre aura été aussi parfait !

Car c’est bien ça, le sujet de ce livre autobiographique : l’histoire de ces deux gamins de la classe moyenne américaine, arrivant fauchés dans la grande pomme, qui vouent une fascination à l’art dans ce qu’il a de plus absolu et extrême et qui veulent y consacrer leur vie. « Pour eux, le monde tout entier était un terrain de jeu magique et l’art tout simplement un mode de vie ».

On les suit dans le New-York underground des années 70, royaume du sexe et de la drogue, peut-être, mais surtout d’une liberté vertigineuse qui nous effraierait aujourd’hui malgré toutes les avancées que l’on se gausse d’avoir obtenues. On parcourt des lieux mythiques peuplés de légendes. On se prend à rêver d’un Eden disparu même si l’on se fourvoie.

Ils sont désarmants, candides, fragiles, timides, comme des enfants, mais aussi, courageux, déterminés, presque invincibles tant ils sont sûrs de leur destinée. « … c’était une période magique et on croyait en la magie ».

Je pense aux Clochards Célestes de Kerouac, je pense à La Bohème d’Aznavour. C’était peut-être la bohème sous acid, le Sida a sifflé la fin de la récré, mais, bon sang, quelle bande de gamins flamboyants !

LA GÉANTE de Charles Baudelaire

 

J’ai pris de la boue et j’en ai fait de l’or

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Du temps que la Nature en sa verve puissante
Concevait chaque jour des enfants monstrueux,
J’eusse aimé vivre auprès d’une jeune géante,
Comme aux pieds d’une reine un chat voluptueux.

J’eusse aimé voir son corps fleurir avec son âme
Et grandir librement dans ses terribles jeux ;
Deviner si son cœur couve une sombre flamme
Aux humides brouillards qui nagent dans ses yeux ;

Parcourir à loisir ses magnifiques formes ;
Ramper sur le versant de ses genoux énormes,
Et parfois en été, quand les soleils malsains,

Lasse, la font s’étendre à travers la campagne,
Dormir nonchalamment à l’ombre de ses seins,
Comme un hameau paisible au pied d’une montagne.

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