Pour une longue dame brune, j’ai inventé Une chanson au clair de la lune, quelques couplets. Si jamais elle l’entend un jour, elle saura Que c’est une chanson d’amour pour elle et moi.
Je suis la longue dame brune que tu attends. Je suis la longue dame brune et je t’entends. Chante encore au clair de la lune, je viens vers toi. Ta guitare, orgue de fortune, guide mes pas.
Pierrot m’avait prêté sa plume ce matin-là. A ma guitare de fortune j’ai pris le la. Je me suis pris pour un poète en écrivant Les mots qui passaient par ma tête comme le vent.
Pierrot t’avait prêté sa plume cette nuit-là. A ta guitare de fortune, tu pris le la, Et je t’ai pris pour un poète en écoutant Les mots qui passaient par ta tête comme le vent.
J’ai habillé la dame brune dans mes pensées D’un morceau de voile de brume et de rosée. J’ai fait son lit contre ma peau pour qu’elle soit bien, Bien à l’abri et bien au chaud contre mes mains.
Habillée de voile de brume et de rosée Je suis la longue dame brune de ta pensée. Chante encore au clair de la lune, je viens vers toi. A travers les monts et les dunes, j’entends ta voix.
Pour une longue dame brune, j’ai inventé Une chanson au clair de la lune, quelques couplets. Je sais qu’elle l’entendra un jour, qui sait demain, Pour que cette chanson d’amour finisse bien.
Bonjour, je suis la dame brune, j’ai tant marché. Bonjour, je suis la dame brune, je t’ai trouvé. Fais-moi place au creux de ton lit, je serai bien, Bien au chaud et bien à l’abri contre tes reins.
J’ai eu mon dernier coup de foudre il y a 15 jours… et c’est pour une femme !
J’ai découvert par hasard que LCP a rajeuni son émission littéraire (vu qu’on partait de Jean-Pierre Elkabbach 😱, c’était assez facile).
L’émission en question s’appelle désormais Livres & Vous (vous l’avez ?😜), elle est présentée par une jeune femme, Adèle Van Reeth, le décor reste le même : la bibliothèque du Sénat. Mais surtout, ça reste l’une des rares émissions sous-titrées pour les sourds et les malentendants sur une chaîne qui, au vu de sa mission, devrait bosser un peu plus sur l’accessibilité !!!
L’émission a déjà commencé, deux auteures sont invitées, elles sortent, chacune, un livre traitant de l’exil.
L’une d’elles, Abnousse Shalmani, est en train de parler. Dans un premier temps, je ne l’écoute pas, je regarde ses cheveux. Je veux les mêmes ! Couleur miel, boucles de bébé, tellement épais qu’on pourrait en faire trois perruques.
CALME-TOI ! Qu’y-a-t-il SOUS ces cheveux ?
Il y a d’abord des yeux. Des yeux sombres, noirs. Tour à tour perçants, rieurs, interrogateurs ; un regard qui se plante dans le vôtre et qui ne le lâche pas.
Puis une bouche, sensuelle, téméraire, exigeante, une bouche pour la vie, qui parle, qui interpelle, qui contredit, qui rit.
Enfin un teint pâle à faire pâlir de jalousie une madone.
J’apprends qu’elle est d’origine iranienne. Née à Téhéran, elle arrive à Paris à l’âge de de 8 ans, avec ses parents qui fuient le régime khomeyniste.
Après le coup de foudre physique, vient le coup de foudre tout court.
Je l’écoute parler d’elle, de son livre, de son exil. C’est comme si un grand courant d’air frais s’engouffrait dans cette bibliothèque. Je suis partagée entre admiration et fous rires.
Admiration, tant elle semble n’avoir peur de rien. Elle affirme ses convictions avec enthousiasme sans être ni péremptoire, ni agressive. Elle est si spontanée, si bouillonnante que la présentatrice a du mal à canaliser l’entretien.
Fous rires car sa personnalité est telle qu’elle prend toute la place, occupe tout l’espace, reléguant les deux autres femmes à l’état de spectatrices, scrutant désespérément d’éventuelles respirations ou pauses qui leur permettraient d’en placer une. Je découvre que la pire chose qui puisse arriver à un écrivain est d’être invité avec elle… mais c’est tellement bon pour les téléspectateurs !
L’émission se termine, je dois lire son livre !
Qu’est-ce que l’exil ? Vous avez 3 heures.
Ce livre est à son image : authentique, foisonnant et exigeant.
C’est l’histoire d’une petite fille de 8 ans, Shirin, partie brusquement d’Iran pour atterrir en France. Elle est arrachée à son pays, sa langue, sa culture, son rang. Elle se retrouve, avec ses parents, dans un deux pièces où vivent déjà ses trois tantes et son grand-père maternels.
Autant de personnes toxiques dans un si petit espace, c’est un record ! Les trois tantes sont pleines d’idéaux, se rêvent révolutionnaires et veulent mener un combat, peu importe lequel, pourvu qu’elles en soient les égéries et qu’il y ait de la souffrance. Le grand-père est un pur salaud.
Comment trouver sa place dans cette famille dysfonctionnelle ? Dans ce pays qui est désormais le vôtre mais dont vous ignorez tout ?
L’émancipation de Shirin passera d’abord par les mots, la langue française. Elle va lui tourner autour, l’observer patiemment puis l’apprivoiser farouchement car sa vie en dépend. Mettre des mots sur les actes, décrire, exprimer ce qu’elle ressent avec justesse et précision, échanger avec d’autres personnes que sa famille, c’est commencer à avoir une existence propre, une indépendance, une légitimité.
Vient ensuite le corps. Ce corps dont on ne parle jamais, qui doit être caché, tu, obéissant, docile. L’envol de Shirin sera également physique, sans tabou, avec impudence et audace, à l’image de cette phrase : « Elle disait en riant qu’elle voulait donner une voix aux femmes qui aiment faire l’amour sans éteindre les lumières ».
Ce récit initiatique est, tour à tour, drôle, impertinent, triste mais toujours envoûtant.
Une seule critique : j’ai trouvé que le livre perdait un peu de son intensité à force de répétitions et longueurs sur la fin (trois fois rien, on coupe dix pages et c’est reparti 😇). Mais ce n’est pas grave, je suis tellement in love d’Abnousse que je lui pardonne 😍😍🤪. C’est décidé ! Ma prochaine lecture sera Khomeyny, Sade et moi !