TRAITÉ SUR L’INTOLÉRANCE de Richard Malka

Qui est Richard Malka ?

C’est un avocat, spécialiste du droit de la presse, qui s’est fait connaître (de moi, en tous cas) lors de deux affaires à l’origine similaire, le blasphème :

  • le procès des attentats de 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher,
  • l’affaire Mila, adolescente menacée de mort sur les réseaux sociaux.

Il est également essayiste, romancier et scénariste de bandes dessinées.

Inlassablement, que ce soit par son activité professionnelle, ses divers engagements, ses écrits ou ses interventions dans les médias, il défend la liberté de penser et lutte contre le fanatisme religieux.

Pourquoi lire ce livre ?

Tout d’abord, je suis raide dingue de son auteur. Pour des motifs futiles et importants.

On va commencer par le futile.

Ce type a un charme fou.

Une des raisons en est son sourire immuable. Avez-vous déjà remarqué que ce sont les gens qui ont le moins de raisons de sourire qui en usent le plus ?

Et puis, physiquement, il est rock. À la TV, il est toujours vêtu d’un p’tit pull noir col V et slim 😍. Mais Richard, Go que je t’épouse ! Je te fais un cercle de protection avec des huiles essentielles et de la bave de licorne et, zou, le tour est joué.

Mais poursuivons par le sérieux.

Son verbe est clair, précis, posé et assuré. Le raisonnement est solide et structuré (encore heureux pour un avocat 🤪).

Le sérieux ultime, ce sont ses convictions et leur universalité : la liberté de conscience et la liberté d’expression.

Convictions qu’il défend au péril de sa vie. Ça sonne comme une formule toute faite. C’est beau, c’est courageux. Super, bravo. Puis on passe à autre chose. Ça va hein, Richard, faudrait arrêter un petit peu de la jouer drama queen. On vit dans un pays libre, tout va bien, respire et prends un verre d’eau.

Sauf qu’il y a toute une réalité derrière. Et elle est moche.

Pour lui, d’abord. Il est menacé de mort pour ses combats. Une vie sous protection, un quotidien restreint. Vous savez, tout ce qu’on fait sans y penser, sans en questionner la valeur : boire un café en terrasse, se balader, faire ses courses. Ces petites choses lui sont des actes dangereux, qu’il doit planifier, organiser, quand ce n’est pas oublier.

Pour nous, ensuite. Si ces convictions doivent être défendues, c’est qu’elles sont en danger. Et à force de rester insouciants et lâches, on accepte petit à petit de s’asseoir sur nos libertés fondamentales. C’est déjà le cas. Qui oserait désormais faire une blagounette sur l’islam au même titre que sur d’autres religions ? Ben pas grand monde. On veut pas d’ennuis, on veut pas choquer, on veut être TO-LÉ-RANTS.

Bref, vous l’aurez compris, admirative quand il cause, il n’y avait aucune raison que je ne le sois pas quand il écrit. C’est chose faite avec « Traité sur l’intolérance ».

La genèse de Traité sur l’intolérance

Ce livre reprend sa plaidoirie lors du procès en appel des attentats contre Charlie Hebdo.

L’appel devait avoir lieu dans la salle Voltaire du Palais de Justice de Paris.

Un signe ! Qui, mieux que Voltaire, a défendu la liberté de penser à travers notamment son Traité sur la tolérance ? À l’époque, un protestant, Jean Calas, est accusé d’avoir tué son fils qui s’était converti au catholicisme. Peu importe que Jean Calas crie son innocence, peu importe l’absence de preuves, il sera exécuté. Révolté par cette injustice, Voltaire œuvrera pour la réhabilitation de l’accusé au travers de ce texte. Réhabilitation qui aura lieu 3 ans plus tard. C’est ballot : le père Calas est mort.

Richard, comme Voltaire, va s’attaquer à la vraie cause de cette terreur et à ses racines. L’accusé est la religion, TOUTES les religions, dès lors qu’elles commettent des dérives.

Pour l’affaire Charlie Hebdo, il remonte aux origines de l’islam et aux deux courants principaux qui se sont affrontés. La face éclairée et la face obscure d’une même pièce. C’est passionnant et limpide.

Puis, il nous met en garde. Lui aussi a été léger et insouciant, il y a quinze ans, au procès des caricatures publiées par Charlie Hebdo. Lui non plus n’a pas vu venir le danger. Depuis, que de morts, terribles et absurdes.

Quatorze siècles après Mahomet et presque trois après Voltaire, rien n’est réglé. Et comme partout, c’est la minorité la plus haineuse, vindicative, bruyante, menaçante qui prend en otage les millions de croyants et d’athées (oui, tant qu’à faire, autant ratisser large. T’as rien demandé ? C’est pas grave, t’auras quand même). L’islamisme leur impose sa vision. Elle est fausse ? Ça n’a aucune importance, c’est juste une question de pouvoir par la peur et la soumission.

Il n’y a pas de délit de blasphème en France qui est un état laïc.

Le blasphème, c’est le ressenti des croyants. Vous imaginez si on le prend en compte ? On n’a pas le cul sorti des ronces. Un RESSENTI Bordel !

On a le droit de se moquer des idées, des croyances et des idéologies. Pas d’inciter à la discrimination ou à la haine contre les croyants.

Merde ! C’est simple !

Tout est à retenir dans ce livre, mais je terminerai avec cette phrase :  » Il n’y a pas de contrainte en religion ».

Ça vient d’où ? Du Coran.

PEAU D’HOMME de Hubert et Zanzim

Mais quelle est donc la différence entre une BD et un roman graphique ?

Le roman graphique semble se vouloir plus respectable. Plus long, il raconte une histoire entière sans avoir besoin de plusieurs tomes et surtout une histoire plus ambitieuse. 🧐 Mouais. Franchement ça me semble un peu subjectif tout ça.

Art Spiegelman aurait dit : « Un roman graphique est une bande dessinée qui nécessite un marque-page”.

Je vais faire ma vieille réac mais ça me semble du snobisme.

Bref, je vais vous parler d’une bande dessinée, une BD, comme quand j’étais petite.

Mais pas n’importe quelle BD !

J’en avais entendu parler il y a longtemps déjà. Des critiques dithyrambiques, des prix à foison, un bel objet à la couverture magnifique. Mais j’ai passé mon chemin en pensant à ma pile de livres.

Hé bien, mieux vaut tard que jamais ! Je suis tellement heureuse de ne pas être passée à côté.

Dans l’Italie de la renaissance, Bianca, jeune fille d’une famille honorable, est promise à Giovanni, un jeune marchand aisé, respecté et très bien fait de sa personne.

Il s’agit bien évidemment d’un mariage arrangé. Bianca ne connaît pas son futur époux. Elle est belle, mais la beauté n’a jamais constitué une dot. Tout au plus une convoitise ou un trophée. Les négociations sont âpres entre les familles.

Beaucoup de jeunes filles seraient ravies, toutes n’ont pas la chance de se voir destiner un mari de leur âge et agréable à regarder. En témoignent ses meilleures amies.

Pourtant, quelque chose chiffonne Bianca. Elle voudrait connaître son promis avant de l’épouser. Quelle idée farfelue ! Réjouis-toi, pauvre sotte et arrête d’avoir des pensées extravagantes !

Seule sa marraine semble lui accorder crédit. Elle propose aux parents de Bianca d’héberger quelques jours sa filleule avant le mariage. Elle va alors lui révéler l’existence d’un secret de famille. Il s’agit d’un trésor qui a traversé les générations de femmes et connu d’elles seules : une peau d’homme.

Dans sa nouvelle peau, Bianca va découvrir le monde des hommes.

Tout le monde devrait avoir une peau de l’autre sexe.

Je trouve que tout le monde devrait vivre cette expérience.

Les femmes expérimenteraient la liberté absolue (enfin presque, n’exagérons rien). La liberté de se promener sans se faire interpeller, sans avoir peur, sans être la cible de reproches quant à leur tenue. La liberté de pouvoir parler impunément sans craindre les sous-entendus. La liberté de faire le premier pas aussi, de penser d’abord à leur plaisir sans passer pour des nymphomanes de la pire espèce. Mais également connaître les injonctions faites aux hommes, celles d’être des mâles, des vrais.

Quant aux hommes, passer une journée dans la peau d’une femme devrait être obligatoire (oui, j’ai un fond dictatorial 😈). À la fin de la journée, je pense que le problème serait réglé. Après s’être fait apostropher et avoir subi quelques mains au cul plus deux ou trois frottements dans le métro, je pense qu’ils comprendraient tous. L’éducation par la mise en pratique !

Mais revenons-en à Peau d’homme. Cette BD est un bijou de beauté et d’intelligence. Elle parle de genre, de tolérance, de liberté, du poids des convenances et de la religion, d’égalité des sexes, d’homosexualité.

Fourre-tout et dans l’air du temps me direz-vous ? Que nenni !

Cet ouvrage magnifique évite tous les pièges et clichés. Il ne se prend pas au sérieux pour aborder des thèmes qui le sont. Mais il le fait consciencieusement. C’est intelligent, léger, drôle, pétillant comme une coupe de champagne et d’une beauté incroyable. Une sorte de conte immersif qui vous fait réfléchir bien longtemps après l’avoir terminé.

Le traité graphique est à couper le souffle. On se croirait dans un théâtre. Une fois les décors intégrés, la priorité est donnée aux personnages qui semblent s’animer sous nos yeux. Le dessin est simple, presque épuré et les couleurs sont superbes de justesse.

Bon, vous l’aurez compris, j’ai kiffé cette BD. Noël approche et c’est une excellente idée cadeau pour TOUT LE MONDE, adultes, adolescent·e·s, c’est un vrai livre d’utilité publique. Zou !

Bonne semaine à tous !

LES EXILÉS MEURENT AUSSI D’AMOUR de Abnousse Shalmani

J’ai eu mon dernier coup de foudre il y a 15 jours… et c’est pour une femme !

J’ai découvert par hasard que LCP a rajeuni son émission littéraire (vu qu’on partait de Jean-Pierre Elkabbach 😱, c’était assez facile).

L’émission en question s’appelle désormais Livres & Vous (vous l’avez ?😜), elle est présentée par une jeune femme, Adèle Van Reeth, le décor reste le même : la bibliothèque du Sénat. Mais surtout, ça reste l’une des rares émissions sous-titrées pour les sourds et les malentendants sur une chaîne qui, au vu de sa mission, devrait bosser un peu plus sur l’accessibilité !!!

L’émission a déjà commencé, deux auteures sont invitées, elles sortent, chacune, un livre traitant de l’exil.

L’une d’elles, Abnousse Shalmani, est en train de parler. Dans un premier temps, je ne l’écoute pas, je regarde ses cheveux. Je veux les mêmes ! Couleur miel, boucles de bébé, tellement épais qu’on pourrait en faire trois perruques.

CALME-TOI ! Qu’y-a-t-il SOUS ces cheveux ?

Il y a d’abord des yeux. Des yeux sombres, noirs. Tour à tour perçants, rieurs, interrogateurs ; un regard qui se plante dans le vôtre et qui ne le lâche pas.

Puis une bouche, sensuelle, téméraire, exigeante, une bouche pour la vie, qui parle, qui interpelle, qui contredit, qui rit.

Enfin un teint pâle à faire pâlir de jalousie une madone.

J’apprends qu’elle est d’origine iranienne. Née à Téhéran, elle arrive à Paris à l’âge de de 8 ans, avec ses parents qui fuient le régime khomeyniste.

Après le coup de foudre physique, vient le coup de foudre tout court.

Je l’écoute parler d’elle, de son livre, de son exil. C’est comme si un grand courant d’air frais s’engouffrait dans cette bibliothèque. Je suis partagée entre admiration et fous rires.

Admiration, tant elle semble n’avoir peur de rien. Elle affirme ses convictions avec enthousiasme sans être ni péremptoire, ni agressive. Elle est si spontanée, si bouillonnante que la présentatrice a du mal à canaliser l’entretien.

Fous rires car sa personnalité est telle qu’elle prend toute la place, occupe tout l’espace, reléguant les deux autres femmes à l’état de spectatrices, scrutant désespérément d’éventuelles respirations ou pauses qui leur permettraient d’en placer une. Je découvre que la pire chose qui puisse arriver à un écrivain est d’être invité avec elle… mais c’est tellement bon pour les téléspectateurs !

L’émission se termine, je dois lire son livre !

Qu’est-ce que l’exil ? Vous avez 3 heures.

Ce livre est à son image : authentique, foisonnant et exigeant.

C’est l’histoire d’une petite fille de 8 ans, Shirin, partie brusquement d’Iran pour atterrir en France. Elle est arrachée à son pays, sa langue, sa culture, son rang. Elle se retrouve, avec ses parents, dans un deux pièces où vivent déjà ses trois tantes et son grand-père maternels.

Autant de personnes toxiques dans un si petit espace, c’est un record ! Les trois tantes sont pleines d’idéaux, se rêvent révolutionnaires et veulent mener un combat, peu importe lequel, pourvu qu’elles en soient les égéries et qu’il y ait de la souffrance. Le grand-père est un pur salaud.

Comment trouver sa place dans cette famille dysfonctionnelle ? Dans ce pays qui est désormais le vôtre mais dont vous ignorez tout ?

L’émancipation de Shirin passera d’abord par les mots, la langue française. Elle va lui tourner autour, l’observer patiemment puis l’apprivoiser farouchement car sa vie en dépend. Mettre des mots sur les actes, décrire, exprimer ce qu’elle ressent avec justesse et précision, échanger avec d’autres personnes que sa famille, c’est commencer à avoir une existence propre, une indépendance, une légitimité.

Vient ensuite le corps. Ce corps dont on ne parle jamais, qui doit être caché, tu, obéissant, docile. L’envol de Shirin sera également physique, sans tabou, avec impudence et audace, à l’image de cette phrase : « Elle disait en riant qu’elle voulait donner une voix aux femmes qui aiment faire l’amour sans éteindre les lumières ».

Ce récit initiatique est, tour à tour, drôle, impertinent, triste mais toujours envoûtant.

Une seule critique : j’ai trouvé que le livre perdait un peu de son intensité à force de répétitions et longueurs sur la fin (trois fois rien, on coupe dix pages et c’est reparti 😇). Mais ce n’est pas grave, je suis tellement in love d’Abnousse que je lui pardonne 😍😍🤪. C’est décidé ! Ma prochaine lecture sera Khomeyny, Sade et moi !

LA PLUS BELLE FOIS QU’ON M’A DIT « JE T’AIME »… de Francis Lalanne

Noooon ! Ne partez pas ! Après tout, on a tous une chanson inavouable… Pas vous ?

Et puis, Francis a été jeune (si !) et moi aussi (si, si !)… et qu’est-ce que j’ai pu chanter cette chanson 😍😍😍

La plus belle fois qu’on m’a dit « je t’aime »
C’était un mec qui me l’a dit.

Il m’a pas regardé
L’air grave et langoureux
Les pupilles bandées
Le biceps amoureux
Il avait pas le regard
De ceux qu’ont rien dans le coeur
Comme tous ces p’tits ringards
Qui jouent les grands… tombeurs
Il m’a regardé simplement
Avec des yeux qui r’gardent vraiment
Pas de sourire et pas d’oeillade
Pas de cinéma et pas d’aubade
Il m’a dit ça comme quand c’est vrai
Il m’a dit ça de mon plein gré
Avec un sourire qui pleure
Comme quand les coeurs sont pas à l’heure
J’me suis senti con ce jour-là
De pas savoir répondre à ça

La plus belle fois qu’on m’a dit « je t’aime »
C’était un mec qui me l’a dit.

Pendant qu’il me regardait
Ça flanchait dans mes yeux
Et plus il me regardait
Plus mon pouls sonnait creux
Le coeur comme un marteau
La tête comme un pourquoi
J’étais mal dans ma peau
Pourtant, il y avait pas de quoi
Pourtant il m’a pas fait du plat
Comme un mec avec une nana
J’ai fait celui qui veut rien entendre
J’ai fait celui qui veut pas comprendre
Et j’ai bredouillé quelques mots
Des trucs qui sonnaient un peu faux
Du style moi aussi je t’aime bien
Tout le monde ici, tous les copains
J’me suis senti con ce jour-là
De pas être comme lui, d’être comme moi

La plus belle fois qu’on m’a dit « je t’aime »
C’était un mec qui me l’a dit.

Il a sourit tout bas
Juste avant de partir
On avait lui et moi
Plus grand chose à se dire
On s’est revu un jour
On s’est rien dit du tout
A chacun son amour
C’est pas le mien, voilà tout.
Aimer les filles ou les garçons
Aimer, c’est aimer de toute façon
Mais…

La plus belle fois qu’on m’a dit « je t’aime »
C’était un mec qui me l’a dit.

COMME ILS DISENT de Charles Aznavour

Parce que l’artiste était curieux, enthousiaste toujours, espiègle parfois.

Parce que, malgré son grand âge, il n’est jamais tombé dans le « C’était mieux à mon époque ».

Parce qu’il parlait de la vie comme personne.

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J’habite seul avec maman
Dans un très vieil appartement rue Sarasate.
J’ai pour me tenir compagnie
Une tortue deux canaris et une chatte.
Pour laisser maman reposer
Très souvent je fais le marché et la cuisine.
Je range, je lave et j’essuie,
A l’occasion je pique aussi à la machine.
Le travail ne me fait pas peur
Je suis un peu décorateur un peu styliste.
Mais mon vrai métier c’est la nuit
Que je l’exerce travesti, je suis artiste.
Jai un numéro très spécial
Qui finit en nu intégral après strip-tease.
Et dans la salle je vois que
Les mâles n’en croient pas leurs yeux.
Je suis un homo comme ils disent.
Vers les trois heures du matin
On va manger entre copains de tous les sexes
Dans un quelconque bar-tabac.
Et là on s’en donne à cœur joie et sans complexe.
On déballe des vérités
Sur des gens qu’on a dans le nez, on les lapide.
Mais on le fait avec humour
Enrobés dans des calembours mouillés d’acide.
On rencontre des attardés
Qui pour épater leurs tablées marchent et ondulent.
Singeant ce qu’ils croient être nous
Et se couvrent, les pauvres fous, de ridicule.
Ça gesticule et parle fort
Ça joue les divas, les ténors de la bêtise.
Moi les lazzi, les quolibets
Me laissent froid puisque c’est vrai.
Je suis un homo comme ils disent.
A l’heure où naît un jour nouveau
Je rentre retrouver mon lot de solitude.
J’ôte mes cils et mes cheveux
Comme un pauvre clown malheureux de lassitude.
Je me couche mais je ne dors pas
Je pense à mes amours sans joie si dérisoires.
A ce garçon beau comme un Dieu
Qui sans rien faire a mis le feu à ma mémoire.
Ma bouche n’osera jamais
Lui avouer mon doux secret mon tendre drame.
Car l’objet de tous mes tourments
Passe le plus clair de son temps au lit des femmes.
Nul n’a le droit en vérité
De me blâmer de me juger et je précise
Que c’est bien la nature qui
Est seule responsable si
Je suis un « homme oh » comme ils disent.

PORTNOY ET SON COMPLEXE de Philip Roth

Philip Roth est mort. Vive Philip Roth !

La première fois que j’ai entendu parler de lui, c’était il y a 4 ans. Je venais de terminer LA VÉRITÉ SUR L’AFFAIRE HARRY QUEBERT de Joël Dicker. Je cherchais des informations sur l’auteur, quand, par hasard, je tombe sur un article accusant Joël Dicker d’avoir plagié un livre de Philip Roth mais sans en approcher le talent.

Bon sang de bonsoir !

Je décidais de vérifier par moi-même et achetais le livre plagié en question, LA TACHE. Mais, un autre article (oui, me disperser, c’est ma passion 🤪), me prévient que ce livre est plus ardu à lire. Et comme je suis un peu allergique à la difficulté, je ne l’ai jamais ouvert.

Mais voilà qu’en mai dernier, Philip casse sa pipe ! Et, en veux-tu en voilà, des hommages, des émissions spéciales, des reportages, des éloges, des superlatifs (tiens, ça ferait un bon nom de salon de coiffure 😂). Bref, ne voulant pas mourir idiote (ni mourir du tout d’ailleurs), je vais chez mon libraire pour lui demander le livre le plus S.I.M.P.L.E de Philip.

Alors là, si même mon libraire sait que je suis une obsédée….

Et là, tranquillou, quasi sans réfléchir, il me tend PORTNOY ET SON COMPLEXE. « C’est facile à lire, c’est pas épais et je suis sûr que vous allez aimer ». Comme il est toujours de bon conseil, je n’hésite pas. « C’est un de ses premiers livres et c’est celui qui l’a fait connaître ».

Tu m’étonnes !!!

Je commence et ce livre est tout ce que je n’attendais pas. Je ne sais pas pourquoi mais j’imaginais un style ampoulé, un vocabulaire complexe, une histoire sophistiquée.

Je découvre un récit hilarant, tendre, cru, vulgaire, porno, nostalgique. Je n’ai jamais autant ri à la lecture d’un livre (ce qui a passablement énervé népoux car c’était incontrôlable et inexplicable).

Quel bonheur de découvrir que cet écrivain, porté aux nues, présenté comme L’AUTEUR AMÉRICAIN MAJEUR du 20ème siècle, au physique austère, à l’air sérieux, est un véritable obsédé du cul (oui, je sais, je sais, c’est un roman, pas une autobiographie… mon œil ouais).

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De quoi ça peut parler un livre drôle et porno ?

C’est très simple ! Portnoy, 33 ans, est chez son psy. Il lui raconte son enfance (étouffée d’amour par une mère juive et un père constipé) et la poussée d’hormones qui l’a envahi vers ses 10 ans et ne l’a plus jamais quitté.

Comment concilier une éducation religieuse stricte avec une obsession du sexe permanente ?

Il aborde tout, sans concession : ses fantasmes sexuels, sa culpabilité, sa honte, sa tendresse pour ses parents (aussi embarrassants qu’aimants), sa judéité (vécue à la fois comme un fardeau et comme une fierté), la communauté juive américaine des années 50. Il dit tout, il ose tout.

Et c’est jouissif ! Et c’est cynique ! Et c’est plein d’auto-dérision ! Et c’est drôle ! Et c’est tendre aussi !

Pourquoi un tel retentissement ?

Ce livre est sorti en 1969. Le scandale a été mondial, le livre jugé sulfureux et son auteur immédiatement déclaré subversif.

Portnoy a été interdit en Australie car jugé pornographique. Parler de soi ainsi, sans filtre, sans complaisance, avouer ou plutôt «dégueuler» ses envies sexuelles et les confronter à la fameuse culpabilité judéo-chrétienne, forcément ça choque.

Les autorités juives, aussi, ont été choquées, les plus radicaux allant jusqu’à traiter l’auteur de « juif antisémite » avec de violentes attaques , «Les juifs du moyen-âge auraient su quoi faire de lui » 😱😱😱 .

Moi, j’y ai vu tout le contraire. Un second degré assumé, une tendresse et une nostalgie pour ses origines, son milieu, son histoire. Même sa famille, étouffante d’amour et d’injonctions, fait envie. Ça rit, ça gueule, ça pleure, ça s’aime… ça vit.

C’est vrai, ce livre peut choquer, mais c’est avant tout un livre de tolérance… et qui vous fait hurler de rire.

Par les temps qui courent ce n’est pas négligeable.

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