Qu’est-ce que la liberté ? Vous avez trois heures
« Tu ne te rends pas compte de la chance que tu as ! »
Bien sûr !!! Je râle plus souvent qu’à mon tour. Dans ce domaine, j’atteins même un professionnalisme qui fait des envieux. Mon népoux me demande souvent où je trouve cette énergie de geindre à chaque contrariété. C’est génétique ! Je tiens ça de ma mère ! AH AH AH, j’imagine sa tête quand elle va lire l’article, mais vu qu’elle a le niveau d’une belette en informatique, elle ne réussira jamais à faire un commentaire…. donc elle râlera (puisque je vous dis que c’est génétique !).
Bref, je râle quand la petite robe à ma taille me passe sous le nez pendant les soldes, quand je reçois un SMS de ma banque me signifiant que la situation de mon compte mérite mon attention, quand mes filles m’annoncent que quelques amis mangeront à la maison et que je me retrouve à faire des pâtes pour 15 ou quand un crétin veut absolument me doubler alors que je roule à 50 et que la vitesse est limitée à 50, bordel !!!
Malgré cette propension à m’énerver, bien française, j’ai toujours eu une conscience aigüe de la chance que j’avais. Je suis libre. Libre de râler, de m’exprimer, de dire ce que je pense sans craindre qu’un voisin aille me dénoncer à la police de la morale, d’aller où je veux, de faire ce que je veux.
Je suis d’une génération et d’un milieu où je n’ai pas eu à lutter pour obtenir le droit d’être ce que je suis. Nos grands-mères et mères ont brûlé leurs soutifs pour que je puisse voter, signer un chèque seule et vivre ma vie amoureuse et sexuelle comme je l’entends.
Aujourd’hui, je fais, globalement, ce que j’ai envie de faire.
Forcément, il suffit de regarder autour de soi pour voir que c’est loin d’être le cas de tout le monde, et cette liberté en devient un privilège, un trésor que je protège et surveille comme le lait sur le feu afin que mes filles en jouissent toute leur vie durant.
Savoir que des personnes n’ont pas le contrôle absolu de leurs pensées, de leur corps ou de leurs actes m’est insupportable et je me suis souvent demandé comment l’être humain peut réussir à survivre, à garder une flamme intérieure hors de portée de quiconque, à trouver la force non seulement d’endurer mais aussi de résister et de combattre.
Imaginer qu’un jour, ma liberté puisse être négociée ou supprimée est impensable… et pourtant, ça peut arriver sans bruit, sans heurts, ça peut même nous être présenté sous forme d’avancées sociales (nous protéger des méchants, rendre service aux femmes en décidant pour elles de disposer de leur corps etc.).
Je palabre, je palabre (j’adore palabrer 😁). Comme je ne suis pas maso, en général, j’évite les livres sur ce sujet. Je n’ai jamais réussi à finir ni Cette aveuglante absence de lumière de Tahar Ben Jelloun, ni Si c’est un homme de Primo Levi. Trop dur.
C’est qui, Bakhita ? Vous avez trois heures
Sauf que ce livre, impossible d’y échapper, tout le monde en parle. C’est un des livres phares de la rentrée littéraire 2017. Il paraît que Véronique OLMI a été invitée à La Grande Librairie, et être invité par François c’est un peu comme être nommé aux Oscars !
Bakhita a décroché le Grand prix du roman Fnac…. Il commence à devenir omniprésent. Donc, je le lorgne, je me dis « un jour, plus tard… », je lis autre chose, j’y repense… Oh et puis ça suffit ! Je suis grande et capable de ne pas chialer quand on me parle d’esclavage. Donc je l’achète.
Je démarre ma lecture et, justement, en préambule, l’auteur cite une phrase de Primo Levi. Allez ! On respire, on va y arriver !
Franchement ? Au début je suis déçue.
L’écriture est informative, le style est nerveux, avec des phrases courtes, limite façon télégramme (Ohhhh, un mot du XIXé siècle 😜). Ça tombe bien, j’adore les écritures nerveuses, fiévreuses. Tout devrait bien se passer.
Sauf que, non, ça ne passe pas. Le style est trop présent, le rendu n’est pas naturel, la lecture n’est pas fluide. Comme si l’auteure avait fait passer le style avant l’histoire, comme si elle ne s’était pas lâchée, tout en retenue et en contrôle. Cela crée une distance, j’ai du mal à rentrer dans le livre. Le point positif c’est que je ne pleure pas !!!
Je continue, et, progressivement, soit je m’habitue, soit il y a un lâcher-prise dans la narration… et je m’attache à Bakhita, je souffre avec elle.
J’apprends qu’elle a vraiment existé, elle a été canonisée par le Pape Jean-Paul II en 2000.
Au final, j’ai appris des choses, ressenti des choses… Je suis contente d’avoir lu ce livre, d’avoir connu Bakhita. Mais ce n’est pas un coup de cœur.
Et vous ? Vous l’avez lu ? Qu’en avez-vous pensé ?